Le bois amical


« Je tombe dans le tome I des œuvres de Paul Valéry de la Pléiade sur un texte magnifique, Louanges de l'eau. Un sommet littéraire. Or une note nous apprend qu'il s'agit d'un texte publicitaire commandé à Valéry par la source Perrier. Je trouve remarquable cette utilisation par le génie de Valéry d'une occurrence totalement commerciale. J.-S. Bach ne procédait pas autrement quand il répondait à une commande de sonate ou de cantate par un chef-d'œuvre immortel. Les mots « génie » et même « talent » ne faisaient pas partie de son vocabulaire. Il ne connaissait que le savoir-faire de l'artisanat le plus humble. Je note aussi que « Le bois amical », le poème le plus délibérément homosexuel que je connaisse, ayant été à l'origine dédié à André Gide, cette dédicace a disparu ici. Il est vrai que quelques années plus tard Valéry dédiait sa Jeune Parque au même André Gide. »

(Michel Tournier, Journal extime, Folio, pp.76-77)